l'incontournable Quincy jones
- Antoine Dubos
- 8 avr. 2022
- 4 min de lecture
À l'occasion de la sortie de son nouveau livre 12 Notes: On Life and Creativity, j'en profite pour vous raconter rapidement le parcours de Quincy Jones. Comme pour mon article précédent, ce texte est plus ou moins une retranscription (avec quelques détails en plus) d'une de mes vidéos YouTube que vous pouvez consulter si vous préférez l'audio à la lecture.
Si vous ne connaissez Quincy Jones qu'à travers sa casquette de "producteur de Michael Jackson", j'espère que ce petit aperçu de sa vie vous donnera envie de creuser le sujet, car croyez moi, vous serez étonné par la diversité et l'abondance de ses collaborations.
Dans cet article, j'essayerai de mettre en lumière non pas sa carrière de producteur, mais plutôt ses débuts dans le monde de la musique et le chemin qu'il a parcouru pour devenir une référence dans le business musical.
Les premiers contacts avec la musique
Alors pour commencer, il faut savoir que Quincy Jones n'a pas commencé à travailler en tant que producteur, c'était un passionné de jazz, et après avoir essayé des dizaines d'instruments à vent dont le tuba, le soubassophone, le cor de baryton, le saxhorn alto, le cor d'harmonie et le trombone, il jette son dévolu sur la trompette et s'entraîne jour et nuit pour devenir trompettiste de jazz.

Si on veut bien comprendre les raisons de son ascension, il faut se remettre dans le contexte et s'intéresser un peu à ses fréquentations de l'époque. Quand il prend des cours de trompette, il a 14 ans (1947) il vit à Seattle et c'est Clark Terry qui accepte de lui enseigner les bases de l'instrument (à 5h du matin avant que Quincy ne parte à l'école). Clark Terry est déjà très connu à l'époque et pour Jones, c'est une véritable aubaine de pouvoir travailler avec un musicien qui a déjà fréquenté les grands noms du jazz. C'est aussi à Seattle que Jones se lie d'amitié avec un jeune chanteur et pianiste de 16 ans très prometteur, qui n'est d'autre que Ray Charles et qui lui apprend également tous ses secrets d'arrangeur et de musicien. C'est dans ce milieu très fertile du Nord Ouest américain que, de fil en aiguille, il réussit à devenir trompettiste dans l'orchestre de Lionel Hampton, qui est à l'époque un des orchestres de jazz les plus connu d'Amérique.



Q le trompettiste
Voilà vous savez maintenant que Quincy Jones (qu'on surnomme "Q") a commencé sa carrière dans la musique en tant que trompettiste. Et vous vous demandez peut-être : "peut-on l'entendre jouer de la trompette dans un de ses albums ?" Parce que quand on dit écouter un album de Quincy Jones pour la plupart de temps, c'est écouter ses compositions qui sont jouées par des musiciens, mais rarement Q lui-même jouer de la trompette. Il y a plusieurs raisons pour cela. La première, c'est qu'en 1974, il subit un AVC qui va le séparer à jamais de son instrument. Il ne pourra plus jamais souffler dans une trompette après cet accident et il est donc impossible de trouver un enregistrement de Jones jouant de la trompette après cette date. La deuxième raison, c'est que même avant 1974, la plupart des enregistrements auxquels il participe sont des sessions d'orchestre de jazz (big band) et il est alors impossible de dissocier la trompette de Jones dans la masse sonore de l'orchestre. Cependant, la tradition du jazz impose souvent des solos improvisés de la part des musiciens, j'ai donc réussi à trouver 2 prestations où l'on peut écouter le trompettiste en action. La première est un concert en 1951 (solo à 1:08) dans le fameux orchestre de Lionel Hampton.
Le deuxième solo est tiré d'une de ses premières compositions : Kingfish (solo à 0:33), enregistré avec l'orchestre de Lionel Hampton le 17 octobre 1950.
Q l'arrangeur
Lorsqu'il quitte l'orchestre de Lionel Hampton, Quincy va petit à petit échanger sa casquette de musicien contre celle d'arrangeur. C'est-à-dire celui qui organise les différentes parties instrumentales pour créer le morceau final. Parce que même s'il fut un trompettiste de jazz très talentueux, sa véritable passion s'avère être l'arrangement, l'orchestration et la composition. Il sait écrire pour l'orchestre et manie avec perfection les timbres des instruments à cuivres pour les faire sonner. Il perfectionne son art pour obtenir une identité musicale qui lui est propre (écriture des cordes, l'utilisation de la flûte dans le big band, les thèmes blues, etc.). Sa grande habilité à écrire des arrangements lui vaut la collaboration avec les plus grands noms du jazz : Duke Ellington, Louis Armstrong, Count Basie, Dinah Washington, Sarah Vaughan, Ella Fitzgerald, Frank Sinatra et bien d'autres.

L'exercice dans lequel il excelle tout particulièrement est l'arrangement pour big band. Voici une de ses compositions pour l'orchestre de Count Basie :
Q le producteur
C'est après avoir travaillé avec toutes les grandes figures du jazz, après avoir écrit une trentaine de musiques de film qu'il se dirige vers la musique populaire américaine et commence dénicher des étoiles montantes. C'est donc un producteur qui connaît donc extrêmement bien :
la technique instrumentale (surtout des cuivres)
la théorie musicale (il a étudié le classique avec Nadia Boulanger)
l'écriture pour orchestre classique et jazz (sa spécialité reste le big band)
la musique de film
et toutes les facettes du business musical
S'il a réussi à propulser Michael Jackson au niveau de star mondial, c'est aussi pour sa faculté a détecter les qualités et le potentiel d'un artiste. C'est sûrement pour toutes ces raisons que Quincy Jones est autant respecté des musiciens et qu'il reste aujourd’hui une référence dans la musique américaine. La récente publication de son livre témoigne de son insatiable dévouement et passion pour le monde musical. À l'heure où j'écris ces lignes, M. Jones a 89 ans et continue encore à produire des artistes.

Si vous voulez en apprendre un peu plus sur sa carrière et sa vie personnelle, je vous recommande de lire sa biographie qui est remplie d'anecdotes et de détails passionnants.
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